Un mode de vie conditionné par la vie agricole 1/2

Posted on Jan 5, 2016
Un mode de vie conditionné par la vie agricole 1/2

Le mode de vie et les coutumes des Karens de Thaïlande sont essentiellement le fait de leurs origines nomades et de leur socle de croyances. La vie agricole et le tissage traditionnel constituent le coeur de l’activité des villageois, encore largement à l’écart des développements économiques de la Thaïlande.

Volontiers indifférents de l’évolution économique ou sociétale du monde extérieur, leurs coutumes, qui permettent de préserver l’harmonie de la vie communautaire et les rapports à la nature, se sont préservées au cours des siècles jusqu’à aujourd’hui. La vie agricole rythme les habitudes de vie d’un village. Elle suit pour ceux de la montagne les étapes de la production du riz ou du maïs, en cohérence avec le cycle des saisons : une saison des pluies de mai à octobre, une saison sèche d’octobre à janvier, et une saison chaude de janvier à mai. Les femmes pratiquent le tissage quand les travaux des champs sont achevés, que la saison ne les réclame pas à la culture, ou pendant les soirées.

Paysan Karen dans une rizière

Une alimentation dépendante de la production agricole

L’alimentation des foyers karens est peu variée, essentiellement à base de riz, de piments et de fruits de la jungle. Pendant les fêtes, on tue un cochon ou un poulet, issus des cheptels que l’on laisse libres d’aller et de venir à proximité d’un village. Le quotidien est agrémenté par les fruits de la chasse ou de la cueillette, mais la déforestation et les habitudes de vie sédentaire ont considérablement amoindri ces ressources traditionnelles.

L’eau consommée est généralement celle des rivières, parfois filtrée grâce aux investissements de l”’oboto”. Le flux hydraulique tend cependant à se réduire au fil du temps, conséquence de la coupe massive des arbres en certains endroits de la région. La tendance s’inverse cependant depuis quelques années, la coupe ayant été strictement réglementée par le gouvernement.

Description de la production agricole

Les Karens cultivent le plus souvent du riz. Ils développent traditionnellement la technique dite de l’abattis-brûlis, mais, interdite par le gouvernement et productrice de maigres rendements, elle est peu à peu remplacée par l’irrigation de parcelles en terrasses. Certains participent aux activités de grands producteurs urbains en développant une production de maïs, essentiellement destinée à la vente par le biais des intermédiaires qui ont introduit la semence.

Parallèlement, la très grande majorité des foyers possède quelques animaux, et produit pour sa propre consommation quelques fruits et légumes rudimentaires, mais sans mettre en pratique de technique particulière.

La culture du riz traditionnelle : l’abattis-brûlis

Cette technique est l’héritage des ancêtres nomades. Elle est fondée sur la fertilisation de la terre par le dépôt naturel des cendres de brûlis que vient féconder la pluie. L’humus forestier est détruit par le feu, ce qui oblige les producteurs à pratiquer un assolement hexaénal forcé par l’épuisement de la terre.

Le gouvernement thaïlandais, désireux de protéger les écosystèmes des forêts, n’autorise pas cette technique. Elle détruit en effet les sols, qui mettent une dizaine d’années à retrouver leur potentiel fertilisant initial. L’assolement forcé induit en outre que les surfaces cultivables soient très étendues autour d’un village.

Certains historiens expliquent que le peuple karen ait été nomade par le fait que leur technique de culture traditionnelle, en épuisant les sols, les obligeait à renouveler périodiquement leurs surfaces exploitables.

En pratique, bien que ce genre de culture soit théoriquement interdite par le “nayo”, elle est le plus souvent tolérée dans la mesure où les villageois en dépendent pour leur alimentation de survie.

Voici les principales étapes de mise en œuvre de cette technique :

  1. Défrichement d’un pan de forêt : la broussaille est découpée en premier, puis les arbustes, puis les plus gros arbres.
  2. Isolation du champ du reste de la jungle, par l’établissement d’un pourtour et d’une barrière.
  3. Abandon de la parcelle pendant une grande partie de la saison chaude, le plus souvent pendant les mois de février et de mars. La terre sèche.
  4. Brûlis, pendant la fin du mois de mars : le feu est mis à la parcelle, et la cendre permet de fertiliser la terre.
  5. Plantation : les femmes creusent des trous dans la terre à l’aide de bâtons pointus, et l’on dépose une graine dans chaque trou.
  6. Protection de la culture pendant la montaison, le plus souvent en faisant la chasse aux oiseaux à l’aide de frondes.
  7. Récolte du riz mûr : les plants sont réunis en bouquets puis foulés.

Les rendements de cette production ne sont pas très importants. La cendre produite par le brûlis se disperse en grande partie, et ne suffit pas à fertiliser suffisamment la terre pour obtenir des récoltes denses. Ils sont en outre d’autant plus faibles, pris dans une vue globale, qu’ils épuisent la terre et nécessitent un très fort investissement pour défricher chaque année les parcelles que la jungle a reprises pendant les six ou sept années de jachère.

 

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