Catégorie : Culture karen

  • Un mode de vie conditionné par la vie agricole 2/2

    Un mode de vie conditionné par la vie agricole 2/2

    Paysage Karen

    La culture du riz en terrasses

    Cette technique est apparue lors de la sédentarisation des communautés karens. Elle est celle généralement développée en Asie, en particulier par les producteurs thaïs. À l’inverse de leurs voisins, les agriculteurs karens ne l’utilisent que pour faire une seule récolte par an, alors que l’utilisation des eaux courantes permettrait d’en faire deux ou trois.

    Les terrasses sont permanentes, et ce sont les dépôts vaseux du limon des rivières qui permettent de fertiliser les sols. Les principales étapes de cette technique sont les suivantes :

    1. Nettoyage des parcelles et réparation des canaux d’alimentation, généralement au début de la saison des pluies (mi-mai).
    2. Labourage de la terre.
    3. Plantation première. Le riz est planté sous forme de bouquets dans des parcelles dédiées.
    4. Repiquage : les bouquets sont déplantés et les racines des plants sont nettoyées ; puis le riz est replanté dans la rizière inondée par poignées de trois ou quatre plants.
    5. Protection des plants et entretien des infrastructures, pendant la montaison.
    6. Récolte du riz mûr : les plants sont réunis en bouquets puis foulés.

    Les rendements obtenus par cette technique sont plus importants que ceux pratiqués par la technique précédente. L’utilisation des rizières permet en outre de dédier des champs aux cultures de manière permanente, épargant aux producteurs le travail laborieux et systématique de défrichement des parcelles.

    Cependant, dans les montagnes, les surfaces de rizières ne sont pas suffisamment importantes pour assurer une production suffisante à l’ensemble des foyers, aussi la technique précédente survit-elle malgré sa moindre pertinence.

    La culture du maïs

    La culture s’est développée sous l’impulsion d’industriels des grandes villes des provinces frontalières. Ces derniers fournissent aux producteurs (le plus souvent des régions limitrophes de la vallée) les semences, les engrais et le savoir-faire élémentaire pour développer la culture du maïs à de grandes échelles. L’ensemble de la production leur est revendue au poids.

    Parfois, la culture est panachée avec la production de riz. Elle est surtout développée dans les régions les plus proches de la vallée, pour des raisons évidentes de proximité avec les intermédiaires.

    Si le développement de la culture du maïs est facilité par les hauts rendements qu’elle induit, le soutien des professionnels urbains, et l’assurance d’un revenu au terme du cycle de production (si tant est qu’aucun aléa ne vienne porter atteinte à l’intégrité des cultures), les industriels intermédiaires rendent la production précaire.

    Si les récoltes sont mauvaises, le producteur karen devra faire face à un endettement important ; il devient prisonnier de l’initiateur de la technique. Les prix pratiqués par les industriels sont rarement à la mesure des prix qu’ils en obtiendront sur les marchés, mais les agriculteurs qui participent à ce système sont captifs de l’apport initial en semences et en engrais.

    D’un point de vue écologique, l’utilisation massive d’engrais chimiques sans formation sur leur nature et sans prévention de leurs effets est préjudiciable aux écosystèmes des villages autant qu’à la santé des producteurs.

    La culture du piment

    La culture du piment est très répandue. Elle ne fait intervenir aucune technique particulière. Le piment cultivé est une plante de l’espèce des piments rouges dont les producteurs karens conservent les graines d’une année sur l’autre. L’épice donne du goût au riz et constitue l’un des ingrédients principaux de la soupe aux poissons et aux piments, l’une des spécialités culinaires du peuple karen. Tous les plats comportent leur proportion de piment.

    La densité en goût du piment séché permet de n’utiliser qu’une petite partie des quantités produites pour l’autoconsommation alimentaire. Le reste est revendu sur les marchés les plus proches, ou à des intermédiaires qui se chargent de le commercialiser en ville. C’est souvent la seule source de revenus fiduciaires d’un foyer.

    Culture du piment

    Les cultures rudimentaires et la cueillette

    Quelques foyers cultivent un petit nombre de légumes ou de fruits pour diversifier son alimentation, mais le phénomène reste peu répandu. Les légumes sont achetés sur les marchés, ou échangés contre des piments ou d’autres produits issus de la cueillette. Lorsque les foyers développent de telles cultures, ils le font sans apporter de soin agricole particulier aux produits qu’ils cultivent, aussi les rendements sont-ils le plus souvent très mauvais.

    La jungle constitue une source de denrées alimentaires non négligeable. Elles sont recueillies par les producteurs pour compléter les modes de production précédents. Ce sont principalement des fruits (bananes, pamplemousses…).

    La déforestation massive en certaines régions de Thaïlande et la sédentarisation des communautés karens a cependant réduit les ressources de la forêt.

    Aussi ces pratiques ne constituent-elles plus aujourd’hui qu’un supplément de plus en plus contingent, qui ne permet que de varier les bolées de riz à l’aune de ce qui est trouvé au jour le jour : crustacés, oeufs de fourmi, miel sauvage, insectes, rats, oiseaux, serpents…

    Élevage, pisciculture

    Tous les foyers possèdent des animaux, qu’ils consomment généralement à l’occasion de fêtes religieuses ou d’autres événements de la vie publique. Les cochons noirs et les poulets sont les plus répandus. Récemment, un intérêt croissant est marqué pour les vaches et les chèvres, qui fournissent à effort égal une quantité de nourriture plus importante. Parfois parqués sous les maisons (notamment pendant la saison des pluies, pour réchauffer les salles), les animaux se promènent le plus souvent en liberté dans l’ensemble du village et de ses alentours.

    Encore une fois, aucune technique particulière n’est mise en œuvre pour améliorer les rendements de l’élevage, par manque de connaissance le plus souvent. Les œufs des poules ne sont pas recueillis, de même que les excréments ne sont pas valorisés sous forme d’engrais.

    Certains foyers qui pèchent construisent des bassins pour faciliter l’élevage des poissons. Ils sont le plus souvent la source des canaux des rizières.

    Les grandes étapes de l’année agricole

    La vie agricole étant essentiellement concentrée autour de la culture du riz, ce sont les phases de sa culture qui dictent la répartition des périodes d’activité. Les autres productions sont organisées en cohérence avec ces périodes.

    Une année est organisée suivant les périodes suivantes :

    1. Décembre – Avril : saison chaude. On prépare les cultures et les champs pour recevoir les semences et accueillir la mousson, et l’on se repose après la fatigue des récoltes (pendant le mois de janvier). Pour ceux qui exploitent des rizières irriguées, l’essentiel du travail consiste à réparer les canaux d’alimentation hydraulique. Pour les autres, la période est éprouvante, et correspond au moment où l’on dégage de nouvelles parcelles en défrichant des pans de jungle. Pendant la période de repos, les femmes se consacrent au tissage.
    1. Avril – Mai : fin de la saison chaude, au cours de laquelle quelques violents orages en fin de période annoncent la saison des pluies. C’est la période pendant laquelle tout est préparé pour recevoir la pluie, élément essentiel du développement des plants de riz. On fait les semences et l’on achève d’isoler les parcelles de terre ou les rizières.
    1. Juin – Septembre : saison des pluies. Le riz des rizières est généralement repiqué fin juillet ; il faut pour les terrains d’abbatis-brûlis surveiller que la montaison se passe le mieux possible et que les champs sont bien à l’abri des animaux. On répand des engrais pour améliorer les rendements.
    1. Septembre – Octobre : fin de la saison des pluies – saison douce. C’est la période des récoltes. Tous les membres de la communauté villageoise participent aux récoltes.
    1. Octobre – Décembre : saison douce. Fin des récoltes et foulaison du riz.

    Récoltes du piment, et revente des surplus sur les marchés.

    Les outils de la production agricole

    La mécanisation est encore très peu répandue. À la période des labours (pour les rizières irriguées, en juin), d’aucuns louent des machines à main.

    Cependant, le prix horaire de l’essence décourage encore beaucoup de producteurs de renoncer à l’utilisation des buffles1. Les autres outils restent rudimentaires (pioches, bèches etc.), et leur usage n’est pas très répandu dans la mesure où l’essentiel de la culture des rizières se fait à la main (plantation, repiquage…) ou à l’aide de moyens simples (batons).

    1. Alors que des études de la FAO soulignent que l’utilisation d’engins motorisés multiplie la productivité des agriculteurs par 1000…

     

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  • Un mode de vie conditionné par la vie agricole 1/2

    Un mode de vie conditionné par la vie agricole 1/2

    Le mode de vie et les coutumes des Karens de Thaïlande sont essentiellement le fait de leurs origines nomades et de leur socle de croyances. La vie agricole et le tissage traditionnel constituent le coeur de l’activité des villageois, encore largement à l’écart des développements économiques de la Thaïlande.

    Volontiers indifférents de l’évolution économique ou sociétale du monde extérieur, leurs coutumes, qui permettent de préserver l’harmonie de la vie communautaire et les rapports à la nature, se sont préservées au cours des siècles jusqu’à aujourd’hui. La vie agricole rythme les habitudes de vie d’un village. Elle suit pour ceux de la montagne les étapes de la production du riz ou du maïs, en cohérence avec le cycle des saisons : une saison des pluies de mai à octobre, une saison sèche d’octobre à janvier, et une saison chaude de janvier à mai. Les femmes pratiquent le tissage quand les travaux des champs sont achevés, que la saison ne les réclame pas à la culture, ou pendant les soirées.

    Paysan Karen dans une rizière

    Une alimentation dépendante de la production agricole

    L’alimentation des foyers karens est peu variée, essentiellement à base de riz, de piments et de fruits de la jungle. Pendant les fêtes, on tue un cochon ou un poulet, issus des cheptels que l’on laisse libres d’aller et de venir à proximité d’un village. Le quotidien est agrémenté par les fruits de la chasse ou de la cueillette, mais la déforestation et les habitudes de vie sédentaire ont considérablement amoindri ces ressources traditionnelles.

    L’eau consommée est généralement celle des rivières, parfois filtrée grâce aux investissements de l”’oboto”. Le flux hydraulique tend cependant à se réduire au fil du temps, conséquence de la coupe massive des arbres en certains endroits de la région. La tendance s’inverse cependant depuis quelques années, la coupe ayant été strictement réglementée par le gouvernement.

    Description de la production agricole

    Les Karens cultivent le plus souvent du riz. Ils développent traditionnellement la technique dite de l’abattis-brûlis, mais, interdite par le gouvernement et productrice de maigres rendements, elle est peu à peu remplacée par l’irrigation de parcelles en terrasses. Certains participent aux activités de grands producteurs urbains en développant une production de maïs, essentiellement destinée à la vente par le biais des intermédiaires qui ont introduit la semence.

    Parallèlement, la très grande majorité des foyers possède quelques animaux, et produit pour sa propre consommation quelques fruits et légumes rudimentaires, mais sans mettre en pratique de technique particulière.

    La culture du riz traditionnelle : l’abattis-brûlis

    Cette technique est l’héritage des ancêtres nomades. Elle est fondée sur la fertilisation de la terre par le dépôt naturel des cendres de brûlis que vient féconder la pluie. L’humus forestier est détruit par le feu, ce qui oblige les producteurs à pratiquer un assolement hexaénal forcé par l’épuisement de la terre.

    Le gouvernement thaïlandais, désireux de protéger les écosystèmes des forêts, n’autorise pas cette technique. Elle détruit en effet les sols, qui mettent une dizaine d’années à retrouver leur potentiel fertilisant initial. L’assolement forcé induit en outre que les surfaces cultivables soient très étendues autour d’un village.

    Certains historiens expliquent que le peuple karen ait été nomade par le fait que leur technique de culture traditionnelle, en épuisant les sols, les obligeait à renouveler périodiquement leurs surfaces exploitables.

    En pratique, bien que ce genre de culture soit théoriquement interdite par le “nayo”, elle est le plus souvent tolérée dans la mesure où les villageois en dépendent pour leur alimentation de survie.

    Voici les principales étapes de mise en œuvre de cette technique :

    1. Défrichement d’un pan de forêt : la broussaille est découpée en premier, puis les arbustes, puis les plus gros arbres.
    2. Isolation du champ du reste de la jungle, par l’établissement d’un pourtour et d’une barrière.
    3. Abandon de la parcelle pendant une grande partie de la saison chaude, le plus souvent pendant les mois de février et de mars. La terre sèche.
    4. Brûlis, pendant la fin du mois de mars : le feu est mis à la parcelle, et la cendre permet de fertiliser la terre.
    5. Plantation : les femmes creusent des trous dans la terre à l’aide de bâtons pointus, et l’on dépose une graine dans chaque trou.
    6. Protection de la culture pendant la montaison, le plus souvent en faisant la chasse aux oiseaux à l’aide de frondes.
    7. Récolte du riz mûr : les plants sont réunis en bouquets puis foulés.

    Les rendements de cette production ne sont pas très importants. La cendre produite par le brûlis se disperse en grande partie, et ne suffit pas à fertiliser suffisamment la terre pour obtenir des récoltes denses. Ils sont en outre d’autant plus faibles, pris dans une vue globale, qu’ils épuisent la terre et nécessitent un très fort investissement pour défricher chaque année les parcelles que la jungle a reprises pendant les six ou sept années de jachère.

     

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  • Organisation sociale et politique 3/3

    Organisation sociale et politique 3/3

    Structuration des communautés

    Relations des communautés karens entre elles

    Les différents villages entretiennent entre eux des relations d’autant plus cordiales que c’est à l’occasion des fêtes ou des cérémonies religieuses que les plus jeunes se rencontrent, et peuvent trouver des homologues qu’ils sont susceptibles d’épouser. Les mariages intra-villages étant minoritaires, il s’établit des relations nombreuses entre les villages d’une même région. On s’invite à l’occasion de fêtes ou de chasses, et les relations sont généralement bonnes.

    Quand elles sont mauvaises, on ne s’invite plus et les apparences sont préservées.

    Les différents villages se connaissent bien. À l’origine, toutes les caractéristiques de caractère et la provenance des karens sont inscrites sur les motifs des habits traditionnels. Ces motifs ou la manière dont les femmes portent la coiffe traditionnelle sont propres à chaque communauté villageoise, aussi chacun sait d’où vient son interlocuteur et à quel groupe il appartient.

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    Relations entre les karens et les thaïs

    Les relations entre les karens et les thaïs sont encore l’héritage de la politique nationaliste de Rama V au début du XXème siècle. Les karens sont encore considérés par la plupart des thaïs ou des chinois comme un peuple inférieur, et ce sentiment conditionne les relations qu’ils peuvent entretenir lors de leurs confrontations économiques ou administratives. Un thaï ou un chinois aura toujours le dernier mot.

    Aujourd’hui, une distinction importante commence à se creuser entre les karens partis à la ville et ceux qui sont restés dans les villages de la montagne ou y sont revenus. Ces derniers sont plus attachés aux valeurs traditionnelles et éprouvent l’importance de les préserver d’une assimilation préjudiciable pour leur culture et leurs références identitaires.

    Cependant, contrairement à leurs cousins birmans, les karens thaïlandais ne revendiquent pas de pouvoir politique, aussi aucune structure ne vient représenter administrativement l’ethnie que des organisations non gouvernementales, présentes le plus souvent dans les camps. Les relations sont rarement explicitement conflictuelles.

     

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  • Organisation sociale et politique 2/3

    Organisation sociale et politique 2/3

    La vie politique dans les villages karens

    Autrefois, le village était sous l’autorité absolue du conseil des anciens et d’un chef de village. Le collège des plus âgés de chaque famille se réunit, discute et prend ses décisions ensemble. En cas de désaccord, c’est l’avis de la majorité qui l’emporte, ou de celui qui a été choisi pour être le chef des anciens. Le conseil des anciens n’a pas le pouvoir exécutif, il revient au chef du village, élu par tous. Au sein du conseil des anciens siège en outre le chef religieux, qui a un rôle de conseiller.

    organisation village karen

    Aujourd’hui, il faut ajouter à ce gouvernement traditionnel un système de représentation politique du gouvernement thaï hérité de la politique de concentration du pouvoir des années 60. Il permet théoriquement aux karens d’être les électeurs de la vie politique de leur village : ils doivent élire un maire, ou “oboto”, et son conseil municipal. Les karens en âge de voter étant peu nombreux dans leurs villages, le maire est le plus souvent responsable de l’administration de plusieurs villages.

    Les “obotos” se réunissent entre eux pour prendre les décisions concernant la vie des villages et allouer les budgets émanant du gouvernement central.

    En particulier, ils sont responsables de la construction des infrastructures comme la construction de routes, l’installation de lignes électriques…

    Le dernier fonctionnaire qui participe à la vie politique du village est le “nayo”. Il est nommé par le gouvernement pour le représenter : il est donc l’incarnation de l’autorité royale, et se charge du respect des lois et de la sécurité.

     

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  • Organisation sociale et politique (1/3)

    Organisation sociale et politique (1/3)

    L’organisation sociale et politique du peuple karen est très largement le fait de son histoire nomade. La famille fonde le sentiment communautaire.

    Famille de Lipomo
    La famille de Lipomo (à droite), responsable de la Coopérative de Terres Karens à Mae Woei Clo .© Amaury Perrachon

    Le plus souvent sous l’autorité de femmes, elles s’assemblent pour former un village. Les anciens, réunis en conseil, décident pour la vie du village, encadrés aujourd’hui par les fonctionnaires administratifs thaïs.

    Le modèle familial, fondement du sentiment communautaire

    Le fondement du sentiment identitaire karen tient à son appartenance à une famille. Cette dernière est sous l’autorité de l’ancien, dont il n’est pas question de remettre en cause l’autorité. Même si l’ancien a tort, le plus jeune préfèrera s’effacer que de contester ses compétences ou la pertinence de ses décisions. À l’origine, la société est matriarcale : c’est la femme qui prend les décision pour l’ensemble de son foyer. Les décisions se prennent toutefois de manière collective, mais la voix de la cheffe du foyer est prépondérante.

    La famille forme une communauté solidaire ; on y appartient véritablement qu’une fois que l’on a atteint l’âge adulte. Autrefois, ce passage s’effectuait à l’occasion d’une cérémonie pendant laquelle le jeune initié se tatoue depuis le haut du bassin jusqu’au-dessus des genoux pour réparer les souffrances maïeutiques qu’il a imposées à sa mère. Ces traditions disparaissent aujourd’hui à mesure que de nouvelles voies sont construites entre les villages de la montagne et les villes de la vallée.

    La société karen est strictement monogame. Les relations hors mariage sont sévèrement condamnées par la communauté ; et la sanction peut aller jusqu’à l’expulsion du village des fautifs concernés. Cet ostracisme est le plus souvent synonyme de mort : un individu seul a forcément été mis à l’écart d’une société et n’est jamais réintégré à aucun village. Il mourra rapidement dans le milieu hostile de la jungle, exposé aux dangers hostiles de la forêt.

    La solitude n’est pas compréhensible : aller seul par les chemins de la jungle n’est pas envisageable pour des raisons de sécurité. L’attachement aux valeurs de la famille s’explique donc en partie par le mode de vie des communautés nomades : il préserve les individus par la solidarité existant au sein d’une entité communautaire.

    Pour la jeune génération, qui se confronte à une société thaï en pleine mutation, la rencontre avec les modes de vie occidentaux, exaltés par les médias auxquels ils ont accès depuis peu, est souvent difficile. La plupart, parfois encouragés par leur famille pour des raisons financières, quittent le foyer familial et vont dans les villes thaïs expérimenter l’occident et gagner un argent plus facile, qu’ils transmettent à l’ensemble de leurs foyers. Ce mouvement est relativement récent, catalysé en outre par le manque d’opportunités professionnelles des montagnes.

     

    Tiré de l’Etude culturelle du peuple Karen de Terres Karens (Tous droits réservés. Ne pas citer ou utiliser sans la permission écrite de l’association.)